La Tunisie commémore le dixième anniversaire de ce qu'on a convenu d'appeler la Rèvolution , ou pour utiliser un terme moins grandiloquent la transition démocratique. Sur des années , on s'est félicité d'une réussite exemplaire, au point de susciter des débats pour savoir si la Tunisie est une véritable " exception" ou simplement un pays " singulier". L'optimisme étant de mise , les quelques ratés sont mis sur le compte d'un parcours tout naturellement semé d'embuches. Malheureusement , tout porte à croire que la Révolution ne fait plus rêver . On le voit dans la manière de rendre compte de la " désillusion" , du "désarroi" , de la " frustration" et de la " déception" des Tunisiens et des observateurs internationaux. Ces qualificatifs dénotent d'un état d'esprit; ils ne disent rien de la nature de la décennie que nous venons de vivre. La transition a-t-elle réalisé ses objectifs ? A-t-elle débouché sur une démocratie dite consolidée? Ou bien , à l'inverse , a-t-elle accouché d'un système inédit ? Mais alors lequel ? Les rédacteurs de ce livre considèrent que nous ne sommes pas passés de la transition à la consolidation , du fait que la démocratie n'est pas la seule règle de la cité, intériorisée par tous les acteurs. Nous ne sommes pas non plus dans un néo-autoritarisme, un régime hybride né dans le sillage des transitions mal réussies. Nous n'avons écarté momentanément la dictature religieuse qu'au prix de concessions qui ont affaibli l'Ètat . En fait , la transition est bloquée. Elle n'avance pas au rythme escompté. Une régression n'est même pas à exclure .