La Vie mode d'emploi est un livre extraordinaire, d'une importance capitale non seulement dans la création de l'auteur, mais dans notre littérature, par son ampleur, son organisation, la richesse de ses informations, la cocasserie de ses inventions, par l'ironie qui le travaille de bout en bout sans en chasser la tendresse, par sa forme d'art enfin : un réalisme baroque qui confine au burlesque.
L'Abistan, immense empire, tire son nom du prophète Abi, "délégué" de Yölah sur terre. Son système est fondé sur l'amnésie et la soumission au dieu unique. Toute pensée personnelle est bannie, un système de surveillance omniprésent permet de connaître les idées et les actes déviants. Le peuple unanime vit dans le bonheur de la foi sans questions. Mais un homme, Ati, met en doute les certitudes imposées. Il se lance dans une enquête sur un peuple de renégats qui vit dans des ghettos, sans le recours de la religion. Au fil d'un récit plein d'inventions cocasses ou inquiétantes, Boualem Sansal s'inscrit dans la filiation d'Orwell pour brocarder les dérives et l'hypocrisie du radicalisme religieux.